Archives du mois de octobre 2025

Discrimination syndicale : le préjudice du salarié est présumé

Posté par Caroline Pappo le 24 octobre 2025
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Un salarié, titulaire d’un mandat de délégué du personnel, est déclaré inapte à son poste. L’employeur sollicite alors l’autorisation de le licencier pour inaptitude, mais l’inspecteur du travail refuse.

Une fois la période de protection liée à son mandat expirée, le salarié est finalement licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Il saisit alors les le Conseil de prud’hommes, contestant son licenciement et invoquant une discrimination syndicale.

La Cour d’appel reconnaît bien l’existence d’une discrimination, mais rejette la demande d’indemnisation au motif qu’aucun préjudice concret n’est démontré.

Saisie du litige, la Cour de cassation casse cette décision : elle rappelle que les articles L.2141-5 à L.2141-7 du Code du travail, d’ordre public, interdisent à l’employeur de tenir compte de l’appartenance syndicale d’un salarié dans ses décisions. Toute mesure prise en violation de cette interdiction est abusive et ouvre droit à réparation.

Ainsi, dès lors qu’une discrimination syndicale est constatée, le salarié subit nécessairement un préjudice, sans qu’il ait à en rapporter la preuve : l’indemnisation est automatique.

Cour de cassation, chambre sociale, 10 septembre 2025, pourvoi n° 23-21.124

L’employeur peut sanctionner différemment des salariés pour une même faute

Posté par Caroline Pappo le 17 octobre 2025
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Un employeur peut sanctionner différemment des salariés ayant commis une même faute, dans l’intérêt de l’entreprise et dans le cadre de son pouvoir d’individualisation des sanctions, sans que cela ne constitue automatiquement une discrimination.

Tel est le rappel que vient d’effectuer la Cour de cassation dans l’une de ses décisions récentes.

En l’espèce, trois salariées, qui travaillaient dans une association venant en aide à des enfants et à des adolescents, se sont vu reprocher d’avoir tardivement révélé à leur hiérarchie des suspicions d’abus sexuels sur mineurs. Deux d’entre elles ont été licenciées pour faute grave et la troisième a fait l’objet d’un avertissement. Une des salariées licenciées soutenait qu’il y avait eu discrimination. En vain.

Pour les juges, la différence de sanctions était justifiée car la première salariée licenciée avait suivi la famille concernée entre décembre 2018 et mars 2020 (date de la révélation des faits) alors que la salariée sanctionnée par un avertissement n’avait suivi cette famille que jusqu’au mois de septembre 2019 et n’avait pas été informée de l’existence de nouveaux éléments alarmants en janvier et février 2020.

Saisie du litige, la Cour de cassation confirme la décision, jugeant que l’individualisation des sanctions était justifiée par des éléments objectifs, sans discrimination, ni détournement de pouvoir. Elle valide ainsi la liberté de l’employeur d’adapter dans ce contexte la sanction à chaque situation.

Cour de cassation, chambre sociale, 17 septembre 2025, pourvoi n° 23-22.456

Licenciement : le droit de se taire n’a pas à être notifié au salarié !

Posté par Caroline Pappo le 10 octobre 2025
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Le Code du travail impose à l’employeur, lors d’un entretien préalable à un licenciement pour motif personnel ou à une sanction disciplinaire, d’indiquer les motifs de la décision envisagée et de permettre au salarié de s’expliquer. Cependant, il ne prévoit pas l’obligation d’informer le salarié de son droit de se taire. Des salariés ont alors contesté cette absence, invoquant le principe selon lequel « nul n’est tenu de s’accuser », issu de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Saisi de la question, le Conseil constitutionnel rappelle que le principe « du droit au silence » ne s’applique qu’aux sanctions ayant le caractère d’une punition, c’est-à-dire relevant de l’autorité publique, comme les sanctions pénales ou administratives. Or, le licenciement pour motif personnel et la sanction disciplinaire décidés par un employeur dans le cadre d’un contrat de travail ne constituent pas des sanctions ayant le caractère d’une punition au sens des exigences constitutionnelles. Ces mesures sont prises dans le cadre d’une relation contractuelle régie par le droit du travail et visent uniquement à tirer les conséquences, sur le contrat de travail, des conditions de son exécution.

En conséquence, le Conseil constitutionnel écarte le grief tiré de la méconnaissance de l’article 9 de la Déclaration de 1789 et juge que les dispositions contestées, en ce qu’elles n’imposent pas à l’employeur d’informer le salarié de son droit de se taire, sont conformes à la Constitution.

Conseil Constitutionnel, 19 septembre 2025, QPC n° 2025-1160/1161/1162

Licencié pour faute grave… mais dédommagé pour humiliation !

Posté par Caroline Pappo le 03 octobre 2025
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Un salarié est mis à pied à titre conservatoire puis licencié pour faute grave en raison de violences physiques et verbales commises au cours d’une altercation avec deux collègues. Il réclame toutefois des dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, reprochant à son employeur, à la suite de l’incident, de lui avoir intimé de « dégager avec ses affaires », de l’avoir poussé et menacé d’un coup de poing.

La Cour d’appel rejette néanmoins sa demande jugeant que le licenciement pour faute grave, parfaitement justifié, ne pouvait, de ce fait, être considéré comme brutal ou vexatoire.

La Cour de cassation censure cette décision : au visa de l’article 1231-1 du Code civil relatif à la responsabilité́ contractuelle, elle rappelle que « même lorsqu’il est justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut causer à celui-ci, en raison des circonstances vexatoires qui l’ont accompagné, un préjudice dont il est fondé à demander réparation ».

Les juges du fond ne pouvaient donc se retrancher derrière le bien-fondé de la faute grave pour s’abstenir de rechercher si la rupture n’avait pas été entourée de circonstances brutales et vexatoires. La Cour d’appel de renvoi devra donc procéder à cette recherche.

Cour de cassation, chambre sociale, 1er juillet 2025, pourvoi n° 24-14.206