Présomption de démission, salarié protégé et saisine de l’inspection du travail

Posté par Caroline Pappo le 11 avril 2025
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La loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 a institué une « présomption de démission » permettant à l’employeur de considérer, au terme d’une procédure définie par le Code du travail, comme démissionnaire un salarié qui n’aurait pas justifié son absence après un certain délai.

Aucune disposition spécifique n’a pour autant été prévue s’agissant des salariés protégés pour lesquels l’autorisation de l’Inspection du travail doit être sollicitée lorsque l’employeur est à l’initiative de la rupture ou en cas de rupture conventionnelle.

C’est dans ce contexte qu’un salarié, par ailleurs conseiller du salarié et par conséquent bénéficiaire d’une protection contre le licenciement, a sollicité en justice l’annulation de la rupture de son contrat de travail, l’employeur ayant fait jouer la procédure de démission présumée sans solliciter au préalable l’inspection du travail.

Saisie du litige, la Cour d’appel de Paris considère que si le statut protecteur ne s’applique pas lorsque le salarié décide unilatéralement de rompre son contrat, la présomption légale de démission, qui fait intervenir l’employeur dans la rupture du contrat de travail, nécessite de faire intervenir l’inspection du travail pour un salarié protégé.

En l’espèce, elle prononce donc la nullité de la rupture du contrat intervenue en violation du statut protecteur et ordonne la réintégration du salarié.

A voir désormais comment se situera la Cour de cassation sur ce sujet épineux. En attendant, la prudence est de mise !

Cour d’appel de Paris, Pôle 6 – Chambre 2, 6 mars 2025, affaire n° 24/02319

Forfait jours : annulation d’une convention et droit à réparation

Posté par Caroline Pappo le 04 avril 2025
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Dans deux décisions récentes, la Cour de cassation est venue apporter une précision importante sur l’indemnisation résultant des irrégularités d’une convention de forfait en jours.

Dans ces deux affaires, une convention de forfait jours avait été conclue entre l’employeur et le salarié.

Dans le premier cas, le salarié avait saisi le juge afin de demander réparation pour non-respect des dispositions légales et de l’accord collectif relatif au forfait jours en matière de protection de la sécurité, de la santé et du droit au repos.

Dans le second cas, la salariée demandait réparation de son préjudice causé par l’insuffisance des protections contenues dans la convention de forfait jours en matière de santé, de sécurité et de droit au repos.

A chaque fois, la Cour d’appel avait rejeté l’indemnisation demandée au motif que la preuve du préjudice n’était pas rapportée.

Saisie des litiges, la Cour de cassation valide ces décisions.

Dans la première affaire, elle juge ainsi que lorsque le salarié a été soumis à une convention de forfait en jours en application d’un accord collectif insuffisant quant aux garanties sur le suivi de la charge de travail, la convention est nulle de sorte que le salarié peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires dont le juge doit vérifier l’existence et le nombre. Il en découle que le manquement invoqué par le salarié n’ouvre pas, à lui seul, droit à réparation : il appartient en effet à ce dernier de démontrer le préjudice distinct qui en résulterait.

Dans la seconde affaire, elle tient le même raisonnement lorsque le non-respect par l’employeur des dispositions de l’accord collectif relatif au forfait jours prive d’effet la convention.

Cour de cassation, chambre sociale, 11 mars 2025, pourvoi n° 23-19.669

Pratiques managériales inappropriées = faute grave ?

Posté par Caroline Pappo le 28 mars 2025
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Un salarié est licencié pour faute grave en raison de ses pratiques managériales inappropriées de nature à constituer un manquement à son obligation en matière de sécurité et de santé à l’égard de ses subordonnés. Concrètement, il lui est reproché un comportement malsain et agressif à l’égard des collaboratrices placées sous son autorité (l’une d’elle ayant quitté l’entreprise pour cette raison) et un mode de management maladroit et empreint d’attitude colérique.

Le salarié saisit le conseil de prud’hommes pour contester son licenciement. A l’appui de sa démarche, il soutient que son comportement ne caractérise pas un non-respect de l’obligation de sécurité. En vain.

Saisie du litige, la Cour de cassation n’est pas de cet avis. Pour elle, les pratiques managériales du salarié sont bien de nature à constituer un manquement à son obligation en matière de sécurité et de santé à l’égard de ses subordonnés et à rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

Le licenciement pour faute grave de ce manager est donc justifié.

Cour de cassation, chambre sociale, 26 février 2025, pourvoi n° 22-23.703

Temps partiel thérapeutique et indemnité de licenciement : quel salaire de référence ?

Posté par Caroline Pappo le 21 mars 2025
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Une salariée, en temps partiel thérapeutique, est placée en arrêt maladie un an plus tard. Deux ans après, elle est licenciée pour inaptitude. Lors du calcul de son indemnité de licenciement, son employeur prend alors en compte les salaires perçus durant son temps partiel thérapeutique, diminuant ainsi le montant de l’indemnité.

Saisis de l’affaire, les juges d’appel rejettent la demande de la salariée, estimant que, faute de disposition conventionnelle contraire, il est possible de retenir le salaire réduit perçu en temps partiel thérapeutique pour le calcul de l’indemnité.

Appelée à trancher le litige, la Cour de cassation censure cette décision et juge que, pour garantir l’égalité entre salariés et éviter toute discrimination liée à l’état de santé, l’indemnité de licenciement doit être calculée sur la base des salaires perçus avant le temps partiel thérapeutique.

Les Hauts magistrats confirment ainsi leur positon désormais bien établie : que le salarié licencié ait d’abord été en arrêt maladie puis en temps partiel thérapeutique ou inversement en temps partiel thérapeutique puis en arrêt de travail, il convient de se référer à la période précédant tant l’arrêt de travail que le temps partiel thérapeutique pour chiffrer l’assiette de calcul de l’indemnité de licenciement.

Cour de cassation, chambre sociale, 5 mars 2025, pourvoi n° 23-20.172

Droit pénal du travail : la faute lourde du salarié n’est pas requise !

Posté par Caroline Pappo le 14 mars 2025
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Un salarié est condamné par le tribunal correctionnel pour avoir conduit un des véhicules de son employeur sous l’emprise du cannabis, en état de récidive, et à une vitesse excessive. A cette occasion, il a eu un accident, provoquant la dégradation d’un tracteur, d’une remorque et d’un container. L’intervention d’un service de dépannage et de réparation a engendré des frais conséquents pour l’employeur, partie civile dans cette procédure.

L’intéressé fait appel de cette décision, mais uniquement sur les disposions relatives à la réparation du dommage matériel.  A l’appui de sa démarche, il soutient que la responsabilité pécuniaire d’un salarié à l’égard de son employeur ne peut résulter que d’une faute lourde ou d’une infraction intentionnelle. En vain.

Saisie du litige, la Cour de cassation juge que le salarié qui a commis une infraction pénale peut être condamné à indemniser son employeur s’il lui a causé un préjudice, sans qu’il soit nécessaire de mettre en évidence sa faute lourde ou son intention de nuire.

En d’autres termes, même en l’absence de preuve d’une faute lourde, l’employeur, en qualité de partie civile, est en droit d’obtenir réparation du préjudice causé par le comportement répréhensible de son salarié.

Cour de cassation, chambre criminelle, 14 janvier 2025, pourvoi n° 24-81.365